C’est plein de vie dedans !

La foi au coeur de la vie

La Société du Christ Seigneur fête cette année ses cinquante-cinq ans. Nous vous offrons ici un témoignage de Diane Chagnon, arrivée quand la Société avait tout près de 25 ans.

Ce qui m’a le plus frappée quand j’ai commencé à fréquenter le Centre Leunis, c’est la rencontre de personnes heureuses, épanouies, aimant la vie et l’assumant pleinement. La vie, ici, fusait de partout : de ces êtres donnés, remplis d’amour et rayonnants d’une secrète plénitude ; de la maison, qui dégageait ordre, beauté, simplicité ; des réunions fraternelles, où l’on faisait la passionnante découverte de l’Évangile et de la vie chrétienne ; des Exercices de saint Ignace, dans lesquels le Seigneur Jésus dévoilait son visage et ses visées, m’entraînant dans l’inconcevable aventure d’une histoire personnelle d’amour entre lui, l’éternel Seigneur de toutes choses (ES no 98), et moi.

Une fois arrivée dans la Société du Christ Seigneur, ce jaillissement de vie n’a fait que s’accroître. Ici, la vie était au-dedans, en chacun de nos coeurs ; elle était entre nous, dans cette joyeuse conspiration de l’amour mutuel et du service de l’Amour ; elle était au-dehors, par ce souci apostolique de la donner à d’autres. Ici, je me sentais vivre, je participais au don de la vie. Ce qui m’a attirée et m’a fait persévérer dans les revers de ma vie pauvre (cf. Si 2, 4), c’est la joie de cette vie nouvelle dans le Ressuscité, joie partagée avec des frères et des soeurs désireux, comme moi, de communiquer cette vie à d’autres.

C’est encore ainsi que je vois la Société du Christ Seigneur : appelée à diffuser partout la vie du Ressuscité ! Naître à cette vie, y croître et m’en nourrir, c’est le plus beau cadeau que j’aie reçu. Cadeau reçu de l’Amour ; cadeau que j’ai pu découvrir et déballer grâce aux soins attentifs de notre Fondateur, le Père Brien ; cadeau toujours renouvelé par le témoignage d’amour des membres de ma communauté ; cadeau partagé et, de ce fait, toujours plus comblant !
Servir en sa présence
En 1975, année de mon entrée dans la Société Leunis, cette dernière a presque 25 ans d’existence. Après la crise d’identité des années 70, c’est un nouveau départ, autour des Constitutions reformulées. À partir de 1977, l’adoption du nom Société du Christ Seigneur aide à expliciter et approfondir le charisme propre de la communauté.

J’arrive donc en pleine période de transition. Mes motivations sont simples : répondre à l’appel de Jésus, mener comme lui, une vie de service et d’obéissance. Mon intelligence perçoit bien l’idéal de la vie consacrée mais, dans la réalité, que d’impuissances à le concrétiser ! Avec quel amour le Seigneur et la communauté se sont penchés sur moi, si brouillonne, pour patiemment me former et m’élever à la vie consacrée ! Ce n’est pas le Seigneur qui aurait inventé le clonage pour faire de moi une super-consacrée en deux temps, trois mouvements ! Non, il m’a prise telle que j’étais et c’est à travers les multiples défis du quotidien que j’ai peu à peu appris à aimer, à servir. Doucement, il sculpte son ouvrage, dans l’obscurité de la vie ordinaire et l’aventure peu ordinaire de côtoyer un Fondateur. C’est ainsi que j’ai pu prendre part à de multiples constructions et travaux d’aménagements, développer divers talents d’écriture ou d’animation, et me rendre utile à la communauté comme le petit pauvre dont parle saint Ignace dans l’exercice de la Nativité (ES no 114).

Je suis la servante du Seigneur (Lc 1, 38), voilà qui pourrait résumer le sens que je donne à ma consécration dans la Société du Christ Seigneur. Chercher en tout à aimer et à me rendre au bon plaisir du Seigneur signifié par les événements, les mandats reçus, les orientations de mes Responsables et celles de l’Église.

Donner à l’Église de nombreux enfants

« Avoir la joie de donner naissance à des enfants toujours plus nombreux et de les voir grandir en sainteté… » Cet extrait de la messe en l’honneur de Marie, Mère de l’Église, rejoint la fin de la Société du Christ Seigneur : pour travailler à l’avènement sur la terre de la Seigneurie du Christ et promouvoir la sainteté dans le monde, susciter des communautés évangéliques bien enracinées dans l’Église et rassembler en ces communautés de foi et de vie des jeunes et des adultes désireux d’être témoins de Jésus Christ dans leurs milieux.

Cette perspective très ignatienne de l’Amour à faire advenir dans les coeurs, notre Fondateur ne manquait pas l’occasion d’en faire saisir le fondement : vivre uni à Jésus et à Marie en s’appliquant à tout faire avec calme, avec soin, avec joie, par amour… J’ai mis du temps à goûter ce raccourci de sainteté. Aujourd’hui, je saisis davantage la portée d’une telle vie de foi et je remercie le Seigneur de m’y conduire. Par ce chemin tout simple, qui a été celui de Marie, Joseph et tant d’autres saintes et saints cachés, je puis participer à la fécondité de l’Église et donner à Dieu de nombreux enfants.

En union avec Marie

Pour me conduire à lui, le Seigneur m’a donné une mère, la sienne. La main dans sa main, je puis marcher plus sûrement dans l’obscurité de la foi. Et la regarder m’aide à mieux saisir ma vocation, de même que la mission providentielle de la Société du Christ Seigneur pour l’Église et le monde d’aujourd’hui. Comme Marie, dont le coeur était entièrement consacré à Dieu, la Société se veut un jardin où le Seigneur trouve son repos. Comme Marie, dont le coeur pauvre se réjouit du don de Dieu et le partage aux autres, elle est au milieu du monde une humble crèche, un signe sensible du Dieu Vivant parmi nous. Comme Marie trouvant sa joie à vivre et servir en présence du Seigneur, elle est un Nazareth où, selon l’expression de notre Fondateur, la prière, l’amour et le service ne font qu’un. Comme Marie étroitement associée à la mission de son Fils, elle coopère de tout coeur à l’apostolat de l’Église, s’ingéniant à faire aimer son enseignement. Comme Marie au Cénacle, elle travaille à former des témoins du Ressuscité. Comme Marie, Mère de l’Église naissante, elle paît tendrement les agneaux du Christ et veille à leur croissance en des communautés vivantes, où il fait bon vivre en frères et soeurs.

Depuis quelques années, le Seigneur m’accorde le privilège d’habiter notre Solitude Notre-Dame-de-Liesse, à Saint-Placide. Jamais je n’ai autant goûté le bonheur d’être à lui. Quand je contemple les splendeurs du paysage ou me trouve seule dans notre petite chapelle pour l’adorer et l’aimer, je mesure plus que jamais la Largeur, la Longueur, la Hauteur et la Profondeur (Ep 3, 18) du don de Dieu, de l’Amour, qui se donne à moi en partage et me fait participer à son oeuvre grandiose de salut. Oui, le Seigneur fait pour moi de grandes choses, Saint est son Nom (cf. Lc 1, 49) !

(Diane CHAGNON, Signes vol. 36, no 3, pp. 120-122)